Atypique et attachante, la parfumeuse créatrice de la marque Vero Profumo nous a quittés à l’âge de 78 ans. Hommage.

vero kern 2018 « Oser faire les choses différemment requiert des efforts », telle est la phrase qu’avait choisie Vero Kern sur son profil Facebook. Et pour ceux qui la connaissaient, même uniquement par ses parfums, cette phrase résume tout à fait son style. Un profil anticonformiste et une parfumerie qui ne l’est pas moins pour cette Suissesse très appréciée des fans de parfums rares.

Basée à Zurich, Vero Kern a eu si l’on peut dire plusieurs vies. Ce n’est qu’à la fin des années 2000 que sont lancés ses premiers parfums alors que la créatrice avait déjà 67 ans.

Sa carrière débute par la pharmacie où les odeurs de plantes aromatiques, d’herbes séchées et d’eau de Cologne ont initié son goût vers la création de parfums, confiait-elle dans une interview à Jeanne Doré en 2008.

Après avoir été préparatrice en pharmacie, elle devient… hôtesse de l’air chez Swissair. Un changement surprenant mais une évolution de carrière où elle confie avoir appris à découvrir de nombreuses odeurs d’ailleurs.

Une formation d’aromatologie et de massage thérapeutique l’amène à se rapprocher des huiles essentielles qu’elle utilisera auprès de la clientèle de son cabinet. Celle-ci lui demandera de créer des concoctions personnalisées et c’est ainsi qu’à la fin des années 90, elle décide de se tourner vers la formulation de parfums. Elle se forme chez Cinquième Sens, sous l’égide de Monique Schlienger (décédée en 2016), femme à qui la parfumerie doit beaucoup.

Un parcours atypique et une carrière de parfumeuse tardive donc. Mais des parfums d’une grande originalité, dans lesquels les huiles essentielles et absolus jouent souvent un rôle pivot dans des structures olfactives parfois déroutantes.

Des œuvres d’art contemporain dans une parfumerie actuelle globale que beaucoup jugent ennuyeuse ou monocorde.

Des émotions brutes qui portent le nom de Kiki, Onda, Mito, Rubj ou Rozy proposées dans de superbes flacons d’extrait déclinés en eaux de parfum et voiles d’extrait.

Onda, Naja et Mito Voile d'Extrait. Photo d'entête : Vero Kern et son chien Isidore à Zurich (photo Sandro Baebler pour Migros Magazine)

Onda, Naja et Mito Voile d’Extrait. Photo d’entête : Vero Kern et son chien Isidoro à Zurich (photo Sandro Baebler pour Migros Magazine)

Sa dernière création, lancée il y a peu résonne comme un testament. Baptisée Naja, c’est un accord tabac miellé habillé d’osmanthus et de tilleul.

Se lancer si tard pour imaginer une œuvre tellement disruptive dans un univers aussi marketé est un message d’espoir pour tous ceux qui ont envie d’aller au bout de leurs rêves. Des parfumeurs créateurs comme Anatole Lebreton, Thierry Blondeau ou plus récemment Marie Clapisson de Fleur de Point ont sans doute pris confiance en eux grâce au culot de Vero Kern. Espérons qu’il y en aura d’autres à se lancer.

Sa marque Vero Profumo mourra-t-elle avec sa créatrice ? C’est possible, tant Vero incarnait sa société. On peut bien sûr espérer que quelqu’un prendra sa suite, ne serait-ce que pour éviter la discontinuation des fragrances.

Parfois une marque de parfumeur-créateur survit ou renaît après la mort de celui ou de celle-ci. C’est le cas de Mona di Orio, dont la fondatrice était fauchée par la mort à 42 ans en 2011. Grace à son partenaire Jeroen Oude Sogtoen, la parfumerie de Nathalie (le vrai prénom de Mona) continue d’exister aujourd’hui. Jeroen s’est interrogé sur la possibilité de prolonger l’œuvre de Mona, en éditant des parfums non lancés et en ayant recours à d’autres parfumeurs indépendants. Et honnêtement, ce n’est nullement une trahison envers l’œuvre de Mona, qui aurait sûrement aimé l’idée que sa marque lui perdure.

Souhaitons à Vero Profumo une longue vie parfumistique et merci à sa créatrice d’avoir titillé nos narines de choses aussi originales.

 

Et vous, connaissiez-vous Vero Kern ? Avez-vous déjà porté ses parfums ?

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7 commentaires à “Disparition de la créatrice de parfums Vero Kern

  1. Christine

    Je suis très peinée d’apprendre cette disparition. Je suis une admiratrice de Vero Kern, tant de son talent de créatrice que de sa personnalité. Je n’ai pas porté ses parfums mais j’aimais particulièrement Onda et Mito.
    Par ailleurs et comme le dit bien votre article, elle est pour moi, un vrai souffle d’espoir, tant mon parcours et le sien présentent de nombreuses analogies.
    Que les fragrances Vero Profumo restent toujours présentes !

    1. Parfumista

      Merci Christine pour ce commentaire plein de chaleur.
      A bientôt sur Parfumista pour des nouvelles plus gaies, on l’espère…

  2. Daniel

    Bonsoir,
    Quelle triste nouvelle, le monde de la parfumerie a perdu une grande dame.
    Ma mère a porté il y a quelques années une de ses créations, Mito un magnifique chypre très vert accompagné d’un beau bouquet de fleurs blanches.
    R.I.P

    1. Parfumista

      Bonsoir Daniel,
      Oui, Mito est un parfum vraiment atypique et élégant.
      A vrai dire, les parfums que Vero a créés sont de vrais ovnis dans l’univers actuel de la parfumerie.
      Merci de votre message et bonne soirée.

  3. Marina

    Bonjour
    J’ai porté pendant des années Rubj, parfum qui m’a littéralement subjuguée ! J’ai porté Naja et Onda également.
    Je désespère de ne plus pouvoir respirer ne serait ce que brièvement ces fragrances incroyables. Je n’arrive pas à faire mon deuil olfactif. Tout me paraît terne. Que sont devenus les parfums de Vero Kern depuis décembre 2018 ? Savez vous s’il est possible d’en trouver encore ?
    Merci.

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