Nous nous sommes tant aimés… Après Shalimar de Guerlain et Trésor de Lancôme*, Armelle du Nord nous confie sa passion passée pour Chanel N°5. Un ressenti mêlé de déception mais aussi de nouvelles envies.
C’est une grande première pour moi, donc je le ferai avec mes mots. Il y a quelques années, je savais qu’à la moindre occasion, anniversaire, Noël, fête, on m’offrirait « mon parfum ». Un plaisir simple, mais un plaisir que je savourais à chaque fois que j’ouvrais ce petit cabochon.
Il m’arrivait de me faire plaisir, d’aller en acheter dans ma parfumerie fétiche. Mon futur mari me fit cette surprise et je l’appréciais d’autant plus… mais, déception totale. Pourtant c’était le même flacon, le parfum semblait identique, mais plus de magie !
Le Chanel Numéro 5, les essences subtiles qui s’en dégageaient n’étaient plus. La déception totale. Je ne sentais plus rien !
J’ai vite comparé en ouvrant un flacon de parfum que j’avais à l’époque, Vivre de Molyneux et ce dernier avait toujours cette senteur**.
Je n’en ai plus voulu, ni plus acheté. Et j’ai été encore plus déçue lorsque qu’une campagne de publicité est sortie sur les écrans de télé. Cela doit faire plus de 20 ans maintenant.
Je suis devenue curieuse de connaître d’autres parfums. D’autres senteurs connues et moins connues. J’ai aujourd’hui une multitude de parfums de marques différentes et je n’ai plus le désir d’être fidèle à un parfum.
Je préfère changer au gré de mes envies et humeurs par crainte d’être déçue. Voilà mon ressenti personnel de Chanel N°5.
(*) Vous avez été nombreux à participer. Nous diffuserons prochainement d’autres témoignages de membres du club Parfumista.
(**) Ces deux parfums sont classés en floraux aldéhydés, même famille olfactive qu’Arpège de Lanvin ou Calèche d’Hermès.
Et vous, quels sont vos parfums Chanel préférés ?
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Finalement, cette reformulation aura eu du bon, elle vous aura permis de découvrir d’autres parfums et peut-être même aura suscité chez vous une passion !
Mais il est vrai que les reformulations sont assez agaçantes, c’est une des raisons pour lesquelles j’aime tant l’Artisan, ils ne reformulent jamais 😛
Bonjour Max,
Merci de votre message. Oui, c’est vrai qu’il y a parfois un côté positif à quitter un parfum qu’on a longtemps porté et le cas d’Armelle n’est finalement pas isolé.
Concernant les reformulations, elles ont deux raisons principales :
-une volonté de moderniser un parfum, d’en changer la formule, exemple avec Miss Dior
-une modification de la législation qui restreint ou interdit l’utilisation d’un ingrédient.
Or la législation change régulièrement et même L’Artisan Parfumeur s’y plie. Après, une marque peut anticiper la réduction ou suppression future d’un ingrédient lors de sa création. Mais le Mûre et Musc de 1978 et celui d’aujourd’hui n’ont plus exactement la même formule, c’est certain.
Parfois, ce n’est pas la législation qui pose problème, mais l’indisponibilité d’une matière première (naturelle ou synthétique). Cette indisponibilité est parfois temporaire, un peu comme pour les médicaments. Parfois elle devient définitive, comme lorsqu’une base n’est plus produite.
Le parfumeur essaie alors de recréer le jus au plus près avec des ingrédients différents. Ce n’est pas toujours réussi malheureusement.
Thierry Wasser de Guerlain s’est plusieurs fois exprimé à ce sujet pour les formules de parfums anciens comme Mitsouko ou L’Heure Bleue. Et finalement, un peu de transparence et de pédagogie, c’est salutaire 🙂
Bonjour,
En effet, je n’avais pas pensé aux reformulations par nécessité. Il est vrai que l’IFRA passe régulièrement sur nos parfums, par exemple.
J’ai eu la chance de pouvoir sentir de la mousse de chêne post IFRA, et en effet, les parfumeurs vont avoir du travail de reformulation ! Elle n’a plus rien à voir avec la mousse de chêne originale.
En revanche, j’ignorais que des ingrédients puissent se trouver en rupture, ou plutôt, j’ignorais que les parfumeurs en particulier puissent rencontrer ce problème.
Quant à la transparence par rapport aux reformulations, certes elle est bienvenue, mais le résultat peut tout de même déplaire, même si on apprécie l’effort.
J’espère simplement que mon cher Passage d’Enfer évitera ces incidents de parcours…
En tous cas, merci de m’avoir éclairé !
C’est aussi ce que j’aime avec votre site : des informations claires et accessibles à mes lacunes. 🙂
Bonjour,
Les reformulations sont bien souvent trop éloignées du parfum que l’on aime / aimait, surtout quand le parfum est votre signature.
Il y a bien une exception qui confirme la règle, c’est Cabochard de Grès en edt. La reformulation l’a adouci et d’importable, il est devenu portable le temps d’un flacon de 100 ml !
En ce qui concerne le N°5, j’ai toujours eu du mal avec lui, dans la mesure où il se caramélise sur ma peau. En revanche, le N°22 est d’une luminosité, d’une finesse… son petit tort, il est dans la collection des Exclusifs, moins accessible dans tous les sens du terme.
Cristalle en edt est une fragrance qui me met de bonne humeur… l’eau de parfum est plus sombre et plus complexe aussi.
Merci Armelle pour ce billet !!!
Bon week-end à tous
Bonjour Laure,
Oui, N°22, quelle beauté ! Aldéhydée mais aussi solaire et sensuelle.
Cristalle en eau de toilette est un très bon choix. Une grande fraîcheur mais aussi une évolution très chic. Pour l’information ce parfum s’est appelé Cristal avant de devenir Cristalle. Un très beau nom, plus féminin mais aujourd’hui Cristalle pourrait tout à fait être une création mixte d’une marque de niche.
Il y a des parfums, comme ça, qui sont telles des rencontres amoureuses.
On ne sait pas pourquoi, on ne sait pas comment mais ce jour là on pousse la porte d’une échoppe de senteurs. On se laisse guidé(e) -oserais-je dire par le bout du nez et du cœur- et, là, c’est La Rencontre.
Dès le premier nuage de gouttelettes odoriférantes propulsé dans notre périmètre vital, un flash irradie tant le cerveau que le corps.
Une douce chaleur irradie ainsi qu’un sentiment de plénitude, d’accomplissement. Un pur bonheur. Tel un coup de foudre, à cet instant précis, c’est Lui. Il ne saurait en être autrement !
On se sent comme happé par une transe extatique… Qu’importe que nous ayons déjà partagé X année(s) de vie commune avec une ou d’autre(s) essence(s), tant et si bien que ce sillage nous identifie auprès de qui nous connaît.
Qu’importe que ce soit notre première aventure ou notre première infidélit. Qu’importe qu’il s’agisse d’une volonté (fût-elle inconsciente) de changement, la marque d’une évolution, d’une rébellion… Il y a comme une attirance mutuelle entre Ce jus et Nous. C’est lui et rien d’autre que lui et, dût-on, parfois, tenter des arrangements avec le ciel, mais il faut sortir d’ici avec le nouvel élu.
Il comble vos attentes, vous offre d’autres espoirs, de nouvelles perspectives.
Il ouvre les portes d’un nouvel univers et cette union dévoile ou dissimule d’autres facettes de votre personnalité.
Il est là, comblant attentes et désirs -souvent secrets- ; tel un amant invisible, caressant, pénétrant ce for intérieur secret et ô combien dissimulé, offrant une osmose complice tant avec l’enveloppe charnelle que l’esprit.
Il n’y a aucun doute possible : c’est lui et rien d’autre que lui.
Il est celui qui vous révèle différemment : c’est à la fois vous sans être tout à fait vous ni totalement quelqu’un d’autre.
Au gré du temps et des épreuves, vous vous apprivoiserez et il y aura comme une forme d’appropriation…
Aussi, dès lors qu’au mieux sa formule change, qu’au pire qu’il soit supprimé, il y a trahison.
On se sent trompé(e) car ce n’est plus celui avec lequel on a tissé tant de liens immatériels. Ce n’est plus celui qui nous a accompagné lors des moments marquants de l’existence. Ce n’est plus celui avec lequel s’était créée cette union qui faisait qu’immanquablement ce sillage signait votre passage. Ce n’est plus cette union, quasi mystique, de deux entités -l’une fût-elle invisible- qui n’en formaient plus qu’une.
Cette trahison efface toute la complicité existentielle entre ce jus et celui qui le porte et, quelque part, il faut faire face à une forme de deuil : on ne retrouvera plus jamais celui qui a partagé notre vie, avec ses joies, ses peines.
Voilà comment on se retrouve dépité(e) face aux décisions des créateurs de parfums et qu’un ressentiment -voire un désamour- naît de ne plus pouvoir continuer notre parcours avec notre alter ego olfactif.
Après pareille déconvenue, allons nous revenir -en supposant ce fait possible- vers notre précédent complice ? Va-t-on s’astreindre à une période sans « partage olfactif » tel que nous le connaissions. Allons nous attendre qu’un autre émoi nous ébranle et, en attendant de retrouver semblable complicité nous jeter sur « les jus à la mode » ? Là, chacun fait selon, comme il peut.
Cependant, même si on finit par oublier ce sillage, demeurera, en mémoire, la découverte de ce parfum-signature, les épreuves affrontées, son nom et l’image de son flacon.
In memoriam !
Bonjour Lorraine,
Merci de votre commentaire, très touchant.
Le parfum, quand il est comme un complice fait partie intégrante de nos vies, c’est vrai.
Vous écrivez parfaitement ces situations de deuil et de trahison. Car au fond, même si le service marketing des marques s’en soucie peu, c’est une part de nous qui disparaît également. Un parfum est tellement plus qu’un produit ou un joli flacon.
Belle journée à vous et à bientôt sur Parfumista.