Parfumeuse indépendante, Cécile Zarokian signe des fragrances pour de nombreuses marques de parfums et de bougies. Nous l’avons rencontrée…
1/ Bonjour Cécile, vous faites partie de la génération montante des parfumeurs. Vous travaillez notamment avec beaucoup de marques de niche. Avez-vous une prédilection pour ce genre de marques, ou est-ce le fait de rencontres et de hasard finalement ?
Mes premières créations en tant qu’indépendante ont été le parfum Private Label et la bougie Ambre 1er pour la marque Jovoy. C’est une marque de parfums mais également une très belle boutique de parfums de niche, et François Hénin connaissait mon travail à travers Epic Woman d’Amouage qu’il vend dans sa boutique.
Suite à ces fragrances, des marques de niche m’ont contactée, et cela a fait « boule de neige ». Je pense qu’une marque de niche a besoin d’une (vraie) création sur mesure, que le parfumeur consacre du temps avec le client à développer la fragrance qui corresponde vraiment au brief* et à l’identité de la marque. Même si sa distribution est limitée…
2/ Parlez-nous de votre première rencontre avec le parfum.
Au départ c’est surtout avec les odeurs de manière générale. Celles de la cuisine arménienne dans mon enfance (les épices des feuilles de vigne et du bastourma-une viande séchée aux épices…), puis les odeurs de lessive des vêtements de mes amis, ou les odeurs des maisons où j’allais. Et pour le parfum : mes premières sorties en parfumerie en rapportant des échantillons.
3/ Quel est le premier parfum que vous ayez porté ? Et le premier que vous ayez offert ?
Le premier parfum que j’ai porté était Tartine et Chocolat de Givenchy. Le premier que j’ai offert était le parfum de ma mère, Femme de Rochas.
4/ Quelles sont vos matières premières de prédilection ? Celles qui vous résistent aussi, peut-être ?
Je n’en ai pas particulièrement, car cela dépend vraiment des briefs et de ce que l’on veut faire. Mais il est vrai que j’apprécie beaucoup l’odeur de la fève tonka. J’ai aussi la chance de pouvoir utiliser fréquemment de très belles matières premières, souvent onéreuses. Alors, je ne m’en prive pas dès que c’est possible, qu’elles soient naturelles ou synthétiques d’ailleurs.
5/ Quelles personnalités du monde du parfum et de la mode admirez-vous ? Pourquoi ?
Dans l’industrie du parfum j’admire beaucoup Edmond Roudnitska, Francis Kurkdjian, Daniela Roche-Andrier, Dominique Ropion ou encore Mathilde Laurent. Pour la mode je ne serai pas très originale en citant Yves Saint Laurent, Gabrielle Chanel, Jean-Paul Gaultier, pour n’en citer que trois.
6/ Quel(s) parfum d’un autre créateur auriez-vous aimé créer ?
Je suis très impressionnée par Eau Sauvage, Le Mâle, et Shalimar.
7/ En tant que créatrice, quelles sont vos influences ?
Toute forme d’art m’influence, que ce soit la musique, les arts graphiques… Mais finalement, ce qui m’influence le plus ce sont mes voyages et les expériences humaines qui s’y déroulent.
8/ Une destination de voyage qui vous a enthousiasmée ?
Difficile d’en choisir une !!! Du Japon j’ai rapporté en particulier un souvenir olfactif du gardénia. De l’Islande, les volutes soufrées. De la Polynésie : le santal des Marquises, les fleurs de tiaré et de frangipanier.
9/ Les voyages sont-ils source d’inspiration pour de futures créations ? Avez-vous par exemple un carnet où vous consignez les souvenirs olfactifs de vos voyages, et sur lequel vous revenez par la suite ?
J’ai effectivement un carnet où je note certains qualificatifs de mes souvenirs olfactifs, assortis de leur contexte, que je sois ou non en voyage d’ailleurs. J’essaie surtout de mémoriser l’odeur et parfois j’y repense en parcourant mon carnet.
10/ Vous êtes à l’initiative d’une exposition où le parfum a rencontré l’art graphique. Est-ce que vous réfléchissez à d’autres rencontres multisensorielles autour du parfum ?
Bien sûr, je trouve certaines synesthésies fascinantes. C’est pourquoi je continue d’en explorer encore, notamment entre la vue, l’odorat et le goût, mais également avec l’ouïe et le toucher. La perception d’un sens influence complètement un autre et c’est pour cela que les expériences polysensorielles sont si intéressantes.
11/ Quel est votre coup de cœur olfactif du moment ?
L’Amber Xtreme. Une nouvelle molécule boisée ambrée très puissante lancée par IFF, auparavant captive**.
(*) cahier des charges créatif imposé ou suggéré par une marque aux parfumeurs, ceux-ci étant souvent mis en compétition
(**) réservée au seul usage des parfumeurs d’une maison de composition (IFF, Givaudan, Firmenich…) et non disponible aux parfumeurs concurrents
Et vous, connaissiez vous Cécile Zarokian ? Y a-t-il des fragrances que vous avez déjà senties ?
11 personnes aiment cet article.
Merci beaucoup pour cette interview parfumée passionnante de Cécile Zarokian, que je connaissais.
Par contre, j’ignorais qu’elle était le nez d’autant de fragrances dont le célèbre Epic Woman d’Amouage !
Merci pour l’interview.
Je crois que C. Zarokian a aussi créé Patchouliful pour Laboratorio Olfattivo (sauf erreur) que j’aimerais beaucoup sentir.